jeudi 3 décembre 2009

Sensations lecture

Envie de partager un véritable coup de foudre pour le livre d'Arnaud DESJARDINS : "LETTRES A UNE JEUNE DISCIPLE "et pour la première partie de la lettre préface écrite par Véronique DESJARDINS :

Sophie,

Cette lettre que je t’adresse aujourd’hui pourrait aussi bien s’intituler « lettre à moi-même », tant il est vrai que, dans les multiples vicissitudes de notre parcours, nous avons encore et toujours à nous confronter aux mêmes vérités. C’est le message d’une sœur, d’une amie qui a traversé des difficultés semblables à celles que tu rencontres aujourd’hui. Souvent, lors de nos échanges, je t’ai entendue pousser des « cris du cœur », mélanges de fureur et de haine suite à certains comportements qui te semblaient inadmissibles et révoltants. Ces cris étaient si déchirants que je n’ai souvent rien dit, consciente que cette plaie qui saignait réclamait avant tout une oreille silencieuse qui ne juge pas.

Le temps n’était pas mûr pour que je puisse partager avec toi ce que ta souffrance m’évoquait.

Cela ne veut pas dire que tu as tort de ressentir les choses comme tu les ressens. Rien ni personne ne peut faire que notre ressenti soit autre que ce qu’il n’est. Mais il nous incombe de ne pas en rester là. Oui, c’est ce que je ressens, c’est indéniable, mais sans oublier qu’il s’agit de ma réalité intérieure – et en aucun cas de la réalité. C’est la confusion entre les deux qui crée tout le problème.

Nos cris du cœur ne doivent en aucun cas être niés. Nous devons leur donner la parole, que ce soit face à un autre qui nous écoute ou dans le secret de nous-mêmes. Mais nous devons les voir pour ce qu’ils sont : des cris du cœur. Ils nous décrivent certes notre monde intérieur, nos blessures, mais ils ne nous décrivent en rien la réalité objective. Le drame commence quand nous nous mettons à croire ce qu’ils nous racontent, que nous pensons qu’ils voient clair et que nous les justifions, au lieu de les considérer comme des blessures qui se sont réouvertes, qu’il va falloir panser et guérir avec amour.

Si nous ne faisons pas cette distinction très nette entre nos émotions et la réalité, si nous n’avons pas un minimum de distance vis-à-vis de nos pensées (en attendant d’en avoir un maximum), alors nous sommes pris dans les rets de nos projections – en pleine illusion, en plein mirage. Si nous y croyons sans aucun recul, nos projections se solidifient et plus rien n’est possible.

Une des paroles les plus importantes qu’il m’ait été donné de lire, quand j’étais adolescente, c’est celle-ci : « Votre être attire votre vie ». J’étais très malheureuse et pourtant cette parole, loin de m’accabler, a été l’incitation à me mettre en marche : si tout allait mal dans ma vie, ce n’était pas le fruit d’une malédiction dont j’étais l’objet, cela tenait à moi. Il n’y avait donc qu’une issue mais cette issue existait : changer.

C’est ainsi que tout à commencé en ce qui me concerne mais c’est ainsi que tout commence – et se poursuit – pour chacun : quand nous cessons d’incriminer le monde et les autres de tous nos malheurs et que nous faisons ce retour sur nous-mêmes : j’y suis pour quelque chose. Non pas que je sois coupable de quoi que ce soit. Ce que je suis, je le suis pour tout un ensemble de raisons, un enchaînement implacable de causes et d’effets qui se sont succédés, jusqu’à produire inévitablement ce que je suis aujourd’hui. Mais si je veux que les choses changent, c’est à moi de faire le premier pas… et les suivants.

Tant que face à une situation qui nous fait mal, voire nous bouleverse, nous nions que cela tient à nous (quoi que nous mettions dans ce « nous » : notre manière de fonctionner, de voir la réalité de travers), tant que nous ne voyons pas qu’un autre, dans la même situation, ne vivrait pas les choses comme nous, tant que c’est toujours « la faute des autres qui se comportent comme des monstres », le chemin, d’une certaine façon, n’a pas vraiment commencé.

Une autre parole de Gurdjieff m’a très tôt interpellée et continue d’être, aujourd’hui encore, un outil précieux : « Vous êtes dans la meilleure situation possible pour progresser ». Qui d’entre nous n’est pas, la plupart du temps, convaincu du contraire, notamment quand la pression des évènements semble resserrer son étau autour de nous, qu’il s’agisse de la perte d’un être cher, d’un compagnon « insupportable » ou d’un patron que nous sentons hostile envers nous. C’est une phrase extrêmement dérangeante car nous sommes bâtis de telle sorte que nous pensons toujours qu’ailleurs ou autrement, ce serait mieux. « Ah, si seulement !... » et tout serait résolu, croyons-nous. Mais, si nous sommes honnêtes envers nous-mêmes, nous savons bien qu’ailleurs n’est pas meilleur pour la simple raison que nous nous emmenons, nous et nos problématiques non résolues, partout où nous allons, où que nous fuyions.

Certes, un environnement différent peut nous donner la sensation de respirer plus vaste, un sentiment d’expansion, qu’il s’agisse d’un changement dans nos relations ou d’un voyage dans un pays lointain dont nous avons longuement rêvé. Ces expériences ne sont pas à négliger, bien au contraire. Elles nous donnent un aperçu d’un état d’être qui pourrait devenir le nôtre, un état libre des circonstances, quelles qu’elles soient. Qu’il est long le chemin pour s’ouvrir à cette idée qu’il n’y a pas de meilleure situation pour notre croissance personnelle que celle dans laquelle nous nous débattons. La preuve, c’est qu’elle nous dérange, nous perturbe, nous irrite, nous déroute – donc nous montre à l’évidence que nous ne sommes pas libres dans ce domaine et que c’est précisément là que doit porter notre effort. Se confronter à cette parole fait taire le mental … pour un temps.

RDV au plus vite pour la deuxième partie de cette missive... si trop d'impatience : achetez le livre sans attendre...

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